Je te vois. Je me vois. Je sais âprement que je ne serai jamais toi.
Je te sais triste. Je le suis aussi.
Un jour, il y a des siècles, on a pu communiquer.
Mais on n'a pas mesuré notre chance.
Peut-être que l'occasion reviendra.
En attendant je reste âprement moi.
Je vis, comme toi, personne ne fait semblant.
Et tes émotions sont souvent les miennes.
Peut-être qu'un jour on en parlera.
Si possible avant que les émotions ne soient interdites.
En attendant je plonge dans la stupeur, la crainte, la rocaille.
Je tombe sur tes aspérités, ta honte je la vois. Ta joie, aussi.
Ton émotion ne me sera jamais interdite.
Mes pigments m'ont dit qu'une fois on communiquerait.
Emmanuel Pinget
Genève