Ibrahim Marzouk

January 10, 1996 to February 10, 1996
Solo
Galerie Janine Rubeiz

Ibrahim Marzouk

Fils de la rue, Ibrahim Marzouk y a vécu, il y est mort.

Pourtant, nul, moins que ce gai luron à la voix d'or qui aurait pu devenir chanteur de haute tradition; nul, moins que ce pur produit des souks beyrouthins qui hantait la confiserie paternelle quand il ne se mêlait pas aux clients des cafés arabes de la place Assour, avide d'observations sur le vif; nul, moins que cet amoureux fou de la vie, ultra-sensible à la solitude des êtres, des choses et des lieux, n'était apparemment voué à devenir, à trente-six ans, en pleine force créative, ce citoyen-martyr exemplaire fauché par un obus dans une file d'attente pour un kilo de pain, aux premiers temps de la guerre.

Même à Hyderabad, aux Indes, où il séjourne en 1960 à titre de boursier, ses sujets favoris restent les rues et les cafés.

De 1965 à 1968, il parfait sa formation artistique à Rome, il s'y laisse fasciner par la noctambule furtivité des chats de gouttière.

A Beyrouth, il élabore, comme s'il se ménageait

prémonitoirement un refuge symbolique contre les rues en passe de devenir mortelles, une imagerie de huis-clos intimiste, dans une pérégrination autour de son atelier et de sa mémoire.

Le miroir, où tout un bric-à-brac incongru de souvenirs d'enfance et de voyages se reflète, souvent avec son propre visage, devient son thème par excellence.

Il traduit son rapport de plus en plus complexe et ambigu avec la vérité et l'illusion, avec lui-même, la réalité, la perception et la peinture, devenue miroir au second degré.

Il sonde inlassablement, dans ses autoportraits obses-sionels, son propre mystère, l'équivoque de la vie et, sans doute, l'énigme de la mort.

Cette ultime période créative lui assigne une page à part dans l'album de la peinture libanaise.

Joseph Tarrab

 - 1995 -